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« Silex and the City, le film », ou comment une clé coudée sème la panique à l’âge de pierre, en version animée

L’AVIS DU « MONDE » – À VOIR
Au terme d’un impérial cheminement – une série en bande dessinée à gros succès (Dargaud, 2009), puis une adaptation, diffusée sur Arte, à non moins gros succès (2012-2017) – Silex and the City, récit philosophique et désopilant de l’âge de pierre qui parle en réalité de notre époque, arrive sur le grand écran. Au cœur de ce microcosme, son auteur, Jul, alias Julien Berjeaut, 50 ans, auteur de BD et dessinateur de presse, apparaît comme un phénomène à part entière. Dessinateur à 10 ans, élève de l’Ecole normale supérieure (ENS) de Fontenay-Saint-Cloud, dans les Hauts-de-Seine, agrégé d’histoire, enseignant d’histoire chinoise à l’ENS, cet homme-là va visiblement très vite, et avec une grande soif de décloisonnement, dans sa tête.
Cette vitesse, presque déraisonnable au cinéma, se retrouve dans le film qu’il signe aujourd’hui avec Jean-Paul Guigue. La simplicité naïve du dessin y est compliquée par une redoutable propension au calembour et au registre référentiel (philosophique, cinématographique, historique et politique), qui fusent ici à un rythme tel que l’esprit d’un adulte raisonnablement constitué peine à suivre. Le comique, non moins frénétique mais au charme duquel succombent grands et petits, emporte toutefois le morceau.
L’histoire est centrée sur la famille Dotcom, au sein de laquelle un sourd conflit relatif à la liberté de la première oppose l’adolescente Web à son père, professeur de chasse de son métier. Et ce qui doit arriver arrive : accompagnant, malgré les objurgations paternelles, en grotte de nuit son nouveau copain, l’artiste contemporain Rahan de la Pétaudière, à une fête où il y aura « les mammifères les plus canons de la préhistoire », Web y consomme des substances illicites qui la plongent dans un profond coma. Consulté par le paternel, un puissant sorcier l’envoie récupérer sa fille, dont l’esprit divague dans un lointain futur.
C’est ainsi que le tandem se retrouve en peau de bête et assez peu lavés dans l’entrepôt d’une marque contemporaine de bricolage suédoise, le bien connu Kamelota, où la direction, tétanisée par leur apparition dans le showroom, les prend pour un couple de « designers décroissants » mandatés par la direction centrale pour donner un nouveau look à la marque. Le récit étant temporairement pris en charge par de la prise de vues réelles, nos deux héros, auxquels notre époque n’inspire qu’une saine défiance, finissent par s’en retourner à l’âge de pierre, emportant par inadvertance une clé coudée avec eux.
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